Métier : goûteur de sirop d’érable | 24 heures
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Métier : goûteur de sirop d’érable

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Illustration Simon Leroux

Goûter du sirop d’érable à longueur de journée pour 25$ l’heure : un rêve diront certains, mais un emploi bien réel et unique au monde pour une quinzaine de personnes au Québec. Ces vérificateurs de sirop d’érable sillonnent le Québec accompagnés de leurs auxiliaires pour inspecter et classer les quelque 300 000 barils produits annuellement dans la province.

Dès 8 h le matin, Serge Bolduc n’a pas de temps à perdre. Chaque vérificateur d’ACER Division Inspection doit vérifier et classer près de 250 échantillons par jour. Il installe donc son matériel en prévision des tests de sirop qu’il fera tout au long de la journée.

Image: Capture d’écran / Alexandre Legault-Déry

Réfractomètre, spectrophotomètre, SpectrAcer : les vérificateurs ont accès à plusieurs appareils scientifiques pour les aider à classer et inspecter le sirop. Mais pour détecter les défauts de saveur, ils continuent de se fier à leurs papilles gustatives en buvant un petit échantillon de la plupart des barils de sirop. Certains sirops sont analysés au préalable à l’aide du SpectrAcer, un robot-testeur développé au Québec, et n’ont donc pas besoin d’être testés.

« L’emploi de vérificateur n’est pas donné à tout le monde. Il y a des gens qui n’ont pas les qualités pour goûter [les défauts de saveur] et il y a des gens qui n’ont pas la capacité de tolérer le rythme de travail de 250 échantillons par jour », explique Serge Bolduc. Serge est d’ailleurs bien placé pour parler de tolérance, lui qui goûte en moyenne 40 000 à 50 000 échantillons par année. Il a d’ailleurs eu des problèmes d’estomac dans le passé à cause de son travail. Aujourd’hui, il recrache la majorité des échantillons qu’il consomme pour éviter de revivre cette situation.

Parmi les défauts de saveur que tentent de détecter les vérificateurs, il y a entre autres le goût brûlé ou caramélisé, la moisissure, le défaut d’origine chimique ou bien le goût de bourgeon.

Image: Capture d’écran / Alexandre Legault-Déry

« Il faut avoir une très bonne mémoire sensorielle pour garder une certaine stabilité dans notre goût, être égal, jour après jour », indique Serge Bolduc.

Cette impartialité est importante puisque le classement effectué par les vérificateurs a une incidence directe sur le revenu des producteurs de sirop. Serge et les quelque quinze autres vérificateurs analysent pour tous les barils de sirop la teneur en sucre, la classe (doré, ambré, foncé ou très foncé), les défauts de saveur et la teneur en plomb. Ces variables vont faire fluctuer le prix accordé au baril et, donc, le salaire du producteur.

« On doit rester calme parce que des fois, il y a des journées où c’est plus tendu parce qu’on joue avec la paie des gens », consent Serge Bolduc. Il ajoute que certaines fois, les producteurs se retrouvent à côté de lui lorsqu’il effectue des tests, rendant la situation encore plus délicate.

Pour s’assurer d’avoir des méthodes de travail efficaces et d’être au goût du jour pour les défauts de saveur, les vérificateurs suivent des formations année après année. Les formations sont données par le ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire du Canada et à l’interne, chez ACER Division Inspection, qui est la seule entreprise mandatée pour la vérification de sirop.

Serge ajoute que l’expérience aide beaucoup dans ce domaine. « Les premières années sont dures. C’est sûr qu’il y a des goûts plus évidents que d’autres quand on commence, mais c’est vraiment avec le temps qu’on réussit à développer une bonne [capacité] de goûter », mentionne-t-il.

Il faut également s’adapter puisque les goûts ont beaucoup évolué ces dernières années, ajoute Serge. « Ce ne sont pas les mêmes goûts qu’on rencontre que quand j’ai commencé. Les défauts de saveur ont évolué. Les technologies changent, donc les goûts changent », avance-t-il.

Serge Bolduc et les autres inspecteurs d’ACER Division Inspection goûteront des échantillons de sirop jusqu’au 30 septembre prochain, date limite pour soumettre son sirop. Plusieurs employés trouveront par la suite un autre emploi, avant le début du prochain temps des sucres en mars. Serge, lui, est parmi les chanceux qui continuent de travailler pendant la saison morte podur ACER sur d’autres projets relatifs aux canneberges et au miel.