La cruauté sans remords

Le recueil de nouvelles «Cruelles», publié tout juste à temps pour l’Halloween, rassemble des textes parfois effrayants, parfois inquiétants, à travers lesquels la cruauté des personnages féminins est explorée sous tous ses aspects. Sur cette photo: Page couverture du recueil de nouvelles «Cruelles».
Le recueil de nouvelles «Cruelles», publié tout juste à temps pour l’Halloween, rassemble des textes parfois effrayants, parfois inquiétants, à travers lesquels la cruauté des personnages féminins est explorée sous tous ses aspects.
Les histoires d’horreur, gore, de manipulations, les histoires qui font grincer des dents ont toujours eu quelque chose de profondément dérangeant, une caractéristique qui distingue nettement ce genre littéraire des autres types de fiction. À la lecture d’un roman d’amour, d’un récit historique ou d’un conte fantastique, les émotions ressenties peuvent être toutes aussi intenses, mais de façon générale, il y règne un confort. Tel n’est pas le cas des histoires où la cruauté froide s'impose fièrement, et ce, sans justification.
Chose curieuse, cet inconfort réussit tout de même à nous tenir en haleine à travers ces aventures sombres, il nous pousse à y revenir aussitôt les premières sensations de dégoût dissipées, l’hostilité qui le tapisse agissant sur nous comme une sorte de magnétisme noir. Et petit à petit, on en prend le pli avec un plaisir assumé, tel un corps contorsionné qui aura trouvé son repos.
C'est cette ambiance souvent inquiétante et ce ton toujours un peu froid qui se dégagent à la lecture des différentes nouvelles qui composent le livre «Cruelles» publié aux Éditions Tête première, un collectif dirigé par Fanie Demeule et Krystel Bertrand.
«Je ne dirais pas qu’elles sont toutes effrayantes, il y en a qui sont plus dérangeantes qu’effrayantes, mais elles sont quand même dans la veine du dérangé», résume d’emblée Krystel Bertrand à propos des différents textes que rassemble le recueil. Ce sont dix autrices et auteurs, dont Marie-Jeanne Bérard, Olivier Sylvestre, Marie-Pier Lafontaine, Anya Nousri et Patrick Senécal, qui ont accepté avec enthousiasme l’invitation des deux codirectrices.
La cruauté n’a pas de genre
Ce qui les rassemble? La violence et la cruauté sans excuses ni remords des personnages féminins.
«Krystel et moi avons un intérêt commun très fort pour tout ce qui est dérangeant, étrange, sombre, indique Fanie Demeule. Et on cherchait vraiment une thématique qui rejoignait à la fois cet aspect-là, mais en même temps quelque chose de féministe, parce que c’est cher à notre cœur.»
«On en est venu à réfléchir à la question de la cruauté des femmes, quelque chose qui est encore assez sous-représenté, ou du moins représenté d’une manière toujours un peu univoque, poursuit-elle. La fameuse vilaine qui est tout le temps l’antagoniste, c’est toujours un personnage super intéressant, mais on reste toujours un peu sur notre faim parce que c’est le personnage très lointain, qui est toujours pensé en binarité, en confrontation avec le personnage principal. Et là on avait vraiment envie d’aller explorer, d’aller plonger dans la psyché de la cruauté plutôt que de la maintenir à distance comme on le voit plus traditionnellement.»
Cette cruauté, elle n’a pas de genre en tant que tel, bien que ce soit toujours des femmes qui la déploient à travers ce recueil.
«C’est sûr qu’on pouvait s’attendre à de la cruauté dans des rapports homme-femme, mais on n’a pas eu que ça, et on était contentes de voir qu’il y avait une dispersion naturelle, explique Fanie Demeule. Dans notre collectif, on a de la manipulation psychologique, mais on a aussi de la cruauté physique, de la torture, on a de la cruauté morale, donc ça vient vraiment explorer de différentes manières la cruauté et ça nous a permis de démontrer que quand les femmes sont cruelles, ce n’est pas nécessairement une cruauté qui va bien différer de celle des hommes. On est cruelles comme n’importe quel humain peut être cruel.»
En somme, une lecture tout indiquée ici pour qui souhaiterait vivre quelques frissons en cette Halloween confinée.
Le recueil de nouvelles «Cruelles» est disponible en librairie depuis le 6 octobre.