Pas même une dette de 200 000$ n’a arrêté le succès de cette entrepreneure
#Blackownedbusiness

Dans le cadre du Mois de l’histoire des Noirs, Porte-monnaie a rencontré 5 entrepreneurs québécois afro-descendants qui lèvent le voile sur leur histoire, les enjeux et les défis d’un entrepreneur noir en 2021.
Les salons Achaïa Select sont une destination beauté incontournable à Montréal. À ses débuts en affaires, Achaïa Saget a eu la mauvaise surprise de rembourser 200 000$ à Revenu Québec pour des erreurs de comptabilité. C’est lors de cette période difficile, qu’elle constate son manque cruel d’éducation sur les finances comme plusieurs autres entrepreneurs de la communauté haïtienne.
- 40 ans, d’origine haïtienne
- Entreprise située à Montréal et sur la Rive-Nord
- Propriétaire des deux salons de beauté Achaïa Select, d’une boutique en ligne et de la marque A.S. professional
- Première franchise black owned Salon Achaïa Select à venir en 2021
- DEC en comptabilité et études en planificatrice financière
- Lancement dans un mois d’une nouvelle gamme d’extensions de cheveux disponibles chez Jean Coutu
Tu as ouvert ton premier salon beauté en 2005, où rapidement tu es devenue une destination beauté très populaire. Pourtant, tu croulais sous les dettes. Comment se fait-il?
Ayoye! Si les gens connaissaient mon struggle! À mon premier salon dans le quartier Saint-Michel, j’avais mis toutes mes économies pour partir en affaires. À un moment donné, Revenu Québec est venu cogner à ma porte. Il y a eu de grosses erreurs de comptabilité. On me réclamait plus de 200 000$ et je n’avais aucune idée de comment j’allais payer cette somme. J’avais vraiment peur de perdre mon salon, qui pourtant roulait comme jamais. La honte face à l’échec me hantait. Il y a tellement de nuits où je n’ai pas dormi...
Ça m’a tellement servi de leçon. J’étais naïve et je faisais affaire avec un comptable inexpérimenté. C’est là que je me suis dit que je ne devais plus jamais faire les mêmes erreurs.
Qu’as-tu donc fait pour sauver ton entreprise à l’époque?
J’ai pris une entente de paiement avec le gouvernement et j’ai engagé un véritable comptable fiscaliste qui a mis mes affaires à jour. C’est fou parce que j’ai appris à parler de mes problèmes financiers pour trouver des solutions. Dans la communauté haïtienne, parler d’argent est tellement tabou et on ne parle jamais de nos problèmes et c’est pourtant là que se trouvent les solutions.
Pourquoi parler de problèmes d’argent est tabou dans la communauté haïtienne?
Soulever les problèmes financiers est synonyme de honte. Il faut toujours faire semblant. Nos parents ne nous ont pas donné d 'éducation financière. Tout ce qu’on nous apprend, c’est d’économiser pour une maison. Une fois qu’on a l’argent, on ne connaît pas toutes les possibilités de l’investissement immobilier.
On fait beaucoup d’erreurs financières, contrairement à nos autres amis qui ont eu un bas de laine et qui ont su tôt dans leur vie comment rouler avec l’argent.
Lorsqu’on parle d’argent, on a peur de le nommer. On dit toujours bagaye, pour en parler et bagaye veut juste dire « une chose » en créole! Pourquoi ne pas nommer les choses véritablement ?! Je crois que c’est à cause du système, qui nous a toujours perçus comme des voleurs et des entrepreneurs escrocs.
Que dirais-tu aux entrepreneurs noirs qui veulent se lancer en affaires?
Éduquez-vous! Il n’y a pas de cours pour savoir comment investir son argent, comment faire de l’argent, comment garder un cash-flow alors, faites-le vous-même.... Les entrepreneurs noirs qui doivent sortir toutes leurs économies pour se lancer, ce n’est pas la seule solution! Il y a des programmes qui existent et il faut s’informer.
Entourez-vous aussi de véritables pros de stratégies financières. Ils ont des réponses qui vont vous faire voir des perspectives d’entreprise auxquelles vous n’auriez jamais pensé. C’est important d’avoir un plan d’affaires, de comprendre son modèle de business et d’établir un plan de finances précis.
Il y a tant d'argent légal à faire au Québec (rires). Vous pouvez me faire confiance!
Ton défi est maintenant de montrer au grand public que les entrepreneurs noirs sont tout aussi capables d’offrir du haut de gamme. Comment t’y prends-tu?
Je me suis battue pour que les gens apprennent à respecter les entreprises noires. Je me suis battue pour chaque cliente en lui offrant les mêmes services et la même qualité, sinon plus, que n'importe quel salon de beauté. J’essaie de défaire l’image du salon de black dans un sous-sol, pas toujours propre... Achaïa Select c’est plutôt l’image de la femme éduquée, qui a de l’argent, indépendante et belle!