Est-ce que les CLSC auraient pu nous aider à traverser la pandémie de COVID-19? | 24 heures
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Est-ce que les CLSC auraient pu nous aider à traverser la pandémie de COVID-19?

Image principale de l'article Les CLSC pour mieux traverser la pandémie?

Les CLSC, qui ont 50 ans cette année, nous auraient permis de nous sortir de la pandémie de COVID-19 en bien meilleur état si on avait conservé leur mission d’origine, selon une auteure et chercheuse.

Ça sert à quoi, un CLSC?   

Aujourd’hui, quand on pense aux centres locaux de services communautaires (CLSC), on n’a pas l’impression que ce sont des centres d’une importance capitale. Plusieurs se demandent probablement quels genres de services on y offre exactement.    

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Mais il y a 50 ans, au moment de leur création, leur vocation était complètement différente. C’est ce que nous a expliqué Anne Plourde, chercheuse postdoctorale à l’Université York et à l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS).    

«On a tous une idée de ce que sont les CLSC. On connaît les CLSC parce que c’est là qu’on va recevoir nos vaccins, des prises de sang, des cours prénataux, mais en fait, les CLSC qu’on connaît aujourd’hui, ça n’a rien à voir avec ce que c’était censé être au départ», explique-t-elle d’emblée.    

Mis au monde en 1971, les CLSC devaient être les véritables portes d’entrée du réseau de la santé et des services sociaux, rappelle Anne Plourde, laquelle est également auteure de l’essai Le capitalisme, c’est mauvais pour la santé, publié chez Écosociété en avril dernier.    

«On était censé recevoir dans les CLSC la gamme complète de services de soins de santé et de services sociaux courants, dits de première ligne, précise-t-elle. Donc, par exemple, on aurait eu là des équipes multidisciplinaires, des médecins de famille, des infirmières, des travailleuses sociales, des psychologues, des ergothérapeutes, même des dentistes.»   

Anne Plourde

Photo courtoisie

Anne Plourde

Amoindrir les ravages de la pandémie       

Depuis, la mission des CLSC s’est retrouvée largement diluée. Pourtant, si on avait conservé le modèle initial, on aurait pu amoindrir certains des drames de la pandémie, selon l'auteure.   

«Si on avait eu de bons services à domicile publics — ce qui faisait partie de la mission des CLSC —, il y aurait eu beaucoup moins de gens qui auraient dû avoir recours à des résidences privées pour aînés, et c’est dans les centres d’hébergement que le virus a trouvé le milieu le plus propice pour faire ses ravages, soutient-elle. Si on n’avait pas eu besoin de concentrer plein de gens vulnérables dans un même endroit, on aurait évité une partie de l’hécatombe, certainement.»   

«On peut penser aussi à tous les problèmes de santé mentale qui sont associés au confinement, qui est très difficile à vivre pour beaucoup de gens, poursuit l’auteure. Dans les CLSC, si on avait eu de bons services de santé mentale, des services de travail social, tous ces services-là auraient été très utiles.»   

Et de façon plus large, c’est également une autre vision du système de santé qui était portée par les CLSC, indique Anne Plourde.    

«Actuellement, ce qu’on a comme réseau, c’est un système très centré sur les médecins, sur les hôpitaux et sur les pilules, détaille-t-elle. Ça, ce sont des choses dont on a besoin, évidemment, mais ce qu’on a vu pendant la pandémie, c’est que c’est loin d’être suffisant.»   

«Ce n’est pas des médecins dont on a manqué le plus pendant la pandémie, poursuit la chercheuse. On a manqué des préposés aux bénéficiaires en CHSLD et en RPA pour prendre soin des personnes vulnérables, on a manqué d’infirmières, ce qui nous a obligés à faire du délestage et à reporter des chirurgies. Donc, si les CLSC avaient pu mener à bien leur mission, ils auraient pu changer la façon dont on aborde la santé, ça aurait pu faire une grande différence dans notre manière de faire face à ce virus-là.» 

Pourquoi a-t-on changé la mission des CLSC?      

Les CLSC auraient donc été d’une grande aide pour affronter la pandémie. Pourtant, il y a longtemps qu’ils ne jouent plus le rôle qu’on leur avait initialement donné. Quelques années après leurs créations, ils se sont en effet heurtés à des pressions politiques et économiques, des pressions qui venaient parfois du réseau de la santé lui-même. 

«Les médecins et les fédérations médicales n’ont jamais voulu s’investir dans ce modèle-là, une minorité de médecins a accepté de travailler dans les CLSC, raconte la chercheuse. Et les CLSC, c’était aussi un modèle qui voulait apporter du changement social. C’était un modèle qui considérait que la santé, ça ne se limitait pas seulement à donner des pilules et à soigner les gens malades, ça impliquait aussi d’agir sur les causes de la maladie, et les causes peuvent être sociales.»    

«À partir des CLSC, il y a eu parfois des mobilisations en faveur du logement social, par exemple, ou contre la pollution d’un lac au mercure par une grande entreprise, poursuit-elle. Tous les enjeux de santé et sécurité au travail ont été portés aussi par certains CLSC. Donc ça, c’était dérangeant pour les élites économiques et les élites politiques locales.»   

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