Au Québec, 3 jeunes sur 10 songent à quitter leur emploi au cours de la prochaine année
Près de trois jeunes Québécois sur dix songent à quitter leur emploi dans la prochaine année, selon un sondage Léger/24 heures.
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Près du tiers des travailleurs âgés entre 18 et 34 ans interrogés (31%) ont répondu être tentés de remettre leur démission dans la prochaine année en raison notamment du salaire, des avantages sociaux et du manque de défis professionnels et de perspectives d’avancement.
«Les jeunes ont plus tendance à avoir le réflexe de quitter leur emploi. En général, ils sont plus mobiles et sont moins attachés à un poste que les autres groupes d’âge et c’est parce qu’ils sont plus ouverts aux différentes opportunités pour faire progresser leur carrière», explique le vice-président adjoint aux affaires publiques et communications chez Léger, Sébastien Poitras.
Quitter sans plan B
Par ailleurs, un jeune travailleur sur quatre (26%) serait prêt à quitter son emploi sans avoir une autre option devant lui, selon le même coup de sonde. Une donnée qui surprend Sébastien Poitras.
«C’est assez fascinant et inquiétant pour les employeurs, confie-t-il. Ça va devenir assez important de combler les attentes des employés en leur offrant des éléments recherchés comme la flexibilité, les conditions de travail et un salaire adéquat, sans quoi ils n’arriveront pas à garder les talents.»
Ils ont choisi de quitter :
La «Grande démission»
Les résultats de ce sondage sont dévoilés au moment où les États-Unis font face au phénomène de la «Grande démission». Plus de 34 millions d’Américains ont quitté leur emploi depuis le début de l’année, selon le Département du Travail des États-Unis; du jamais-vu en 20 ans. Ces démissions de masse témoignent de l’insatisfaction des Américains quant à leurs conditions de travail et à leur salaire.
«Au Québec, on n’est pas devant un phénomène de grande démission, mais plutôt ce que j’appelle une "grande danse", se plait à dire le vice-président régional principal (Québec et Ottawa) de la firme de conseil en ressources humaines Robert Half, Michael O’Leary. Il y a un grand mouvement de main-d’œuvre associé à une plus grande facilité à dénicher des opportunités professionnelles.»
- La journaliste Anne-Sophie Roy revient sur le dossier à QUB radio:
Conscientes de leur avantage, des personnes sont plus exigeantes envers leur employeur et ont moins de difficulté à quitter leur emploi pour aller chercher mieux chez le voisin. C’est aussi ce que constatent des experts dans le contexte actuel qui favorise la main-d'oeuvre: les employés gagnent en confiance dans leur capacité à changer d’emploi.
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«Il se passe quelque chose, admet la professeure au département d’organisation et ressources humaines à l’ESG UQAM, Joëlle Carpentier. On ne vit peut-être pas le phénomène de la Grande démission, mais on vit une pénurie de main-d'œuvre. Le phénomène se vit juste différemment ici, du moins pour le moment.»
Cette dernière croit aussi que la volatilité de certains employés et la facilité à changer de travail n’est pas propre aux jeunes générations - les millénariaux et la génération Z - et que les gens de tous les âges cherchent à répondre à différents besoins psychologiques au travail.
«La différence, c’est que les jeunes évoluent dans un marché de l’emploi en faveur de l’employé et ils ont le "luxe" de pouvoir choisir en fonction de leurs besoins», explique Joëlle Carpentier.
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Le salaire et la flexibilité comme priorités
Parmi les répondants âgés de 18 à 34 ans, 73% identifient que le salaire et les avantages sociaux sont parmi les éléments les plus importants pour rester à long terme dans une entreprise, tandis que 52% considèrent que la flexibilité - tant du point de vue de l’horaire que de la conciliation travail/vie personnelle – fait partie des priorités pour rester à l’emploi, selon le sondage Léger/24 heures.
Cette tendance a surpris Stéphane Rochereau, associé chez Brio Conseils, firme-conseil en management, qui notait que la génération Y - c’est-à-dire les personnes nées entre 1980 et 1996 - portait une plus grande importance à la vision de l’entreprise et les perspectives de développement avant la pandémie.
«Je me demande si ce n’est pas là un effet de la crise sanitaire, analyse-t-il. Quand tu côtoies la crise et que tu es près du précipice, tu te rends compte que ces éléments-là sont peut-être plus importants que prévu.»
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La pandémie comme temps de réflexion
La pandémie a aussi donné l’occasion à plusieurs de revenir à l’essentiel et de prendre une distance face au travail. «L’isolement a donné de l’espace pour se requestionner», estime la professeure à l’ESG UQAM, Joëlle Carpentier.
«Il y a un mouvement de recherche de sens, de repenser le rôle du travail dans la vie et on sent qu’il y a une envie de répondre à certains problèmes dont celui de la santé mentale et psychologique au travail», donne en exemple l’experte.
Du côté des employeurs, ils doivent redoubler d’efforts pour garder les travailleurs en poste, et en particulier la jeune génération, croit Michael O’Leary.
«De ma propre expérience, les Y et les Z sont plus demandants tant au niveau technologique que de la culture d’entreprise et même l’implication sociale. Les employeurs doivent donc complètement revoir leurs stratégies pour faciliter la rétention», explique l’expert de la firme Robert Half.
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Méthodologie : Sondage réalisé du 12 au 14 novembre 2021 auprès de 1000 Québécois âgés de 18 ans ou plus. À titre comparatif, la marge d’erreur pour un échantillon de 1000 répondants est de plus ou moins 3,1 %, 19 fois sur 20.
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