Des organisations d’ici encouragent leurs travailleurs à décrocher
Des organisations d’ici ont rivalisé de créativité pour offrir à leurs employés ou à leurs membres des cadres pour mieux décrocher. Si certains y vont de formelles interdictions d’envoyer tout courriel après 18h, d’autres souhaitent plutôt ouvrir la discussion. Voici trois cas de figure.
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Code Marketing: une politique stricte, mais efficace
C’est avec le télétravail que Code Marketing, une agence montréalaise de 20 têtes, remarque que plusieurs employés travaillent de longues heures ou prennent l’habitude d’envoyer des courriels tard le soir.
«On s’est intéressés aux effets que peuvent avoir ces comportements-là dans nos vies. Par exemple, recevoir un message ou un courriel à 20h quand tu es en train de souper ou de relaxer, ça met une pression, explique Laurianne Lachapelle, directrice Finance, culture et talent chez Code Marketing. On a souvent peur de manquer quelque chose et certaines personnes peuvent même culpabiliser à l’idée de ne pas être en train de travailler.»
C’est après avoir sondé ses employés et présenté une formation abordant les risques de tels comportements sur la santé mentale qu’une politique de déconnexion est entrée en vigueur au début de l’été 2021.
«Notre politique est très simple et brève. L’une des règles est de désactiver les notifications des applications liées au travail en dehors des heures de bureau. On a aussi opté pour la fin de la journée officielle à 18h, étant donné qu’on a une semaine de travail de 4 jours et demi. Après 18h, plus personne n’a le droit d’envoyer des messages dans les canaux de communication commun. Si tu veux envoyer un courriel, tu dois le programmer pour le lendemain matin.»
Ce n’est pas tout: pendant les vacances, l’agence se dit «très sévère».
«Personne n’a le droit de communiquer avec les employés en vacances. C’est complètement interdit. Ça vaut aussi pour le boss!»
Tellement interdit que Laurianne Lachapelle a même déjà menacé de bloquer les accès d’un membre de son équipe qui suivait les nouvelles de l’entreprise pendant ses semaines de repos.
L’entreprise montréalaise est pourtant bien consciente que les agences marketing et publicitaires ont bien souvent mauvaise réputation en termes de conditions de travail.
«Dans les agences, il y a souvent beaucoup de pression pour faire des heures supplémentaires. Mais nous, on veut s’écarter de ça le plus possible.»
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Barreau de Québec: 28 jours... pour décrocher
Pour une 2e année consécutive, le Barreau de Québec - un regroupement d’avocats dans la grande région de Québec - a lancé son défi «On décroche» pendant tout le mois de février, une occasion pour les avocats de mieux communiquer et de prendre le temps de se reposer.
«Notre objectif, c’est d’offrir tant à l’expéditeur qu’au destinataire un moment de répit et le droit de décrocher de 19h à 7h, précise Me Simon-Pierre Lavoie, président du Comité conciliation travail-vie personnelle du Barreau de Québec. Ça va dans les deux sens: l’un peut retarder l’envoi de son courriel si ce n’est pas urgent et l’autre ne sentira pas la pression de devoir lire ses courriels et d’y répondre.
Me Lavoie est bien clair: il ne souhaite pas empêcher les gens de travailler de soir et ne revendique pas non plus le droit à la déconnexion comme tel.
«On est plutôt à l’étape d’une prise de conscience, nuance-t-il. On n’encourage pas l’obligation d’être déconnecté de 19h à 7h, mais on encourage les avocats de le faire pour améliorer les stratégies de communication, de réduire le stress et favoriser le repos.»
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Banque Nationale: se déconnecter, mais aussi prioriser
La recherche d’équilibre pour les employés n’est pas née de la dernière pluie à la Banque Nationale. Depuis 2019, l’entreprise s’efforce de développer une saine culture d’entreprise auprès de ses 20 000 employés.
«Au début de la pandémie, les employés ont commencé à nous confier que leur vie avait changée. Leur nouvelle vie, c’était d’être connecté à un écran à temps plein. Oui, moins de transport, mais plus de connexion», illustre le vice-président du Centre Conseil Expérience-Employé de la Banque Nationale, Danny Déry.
Sentant qu’elle devait agir, l’entreprise s’est tournée vers des «engagements de base» pour favoriser un équilibre sain au travail. Concrètement, elle suggère aux employés d’éviter les rencontres entre 12h et 13h, de terminer toute rencontre pour 17h, de limiter les rencontres à 50 minutes plutôt que 60 et à prévoir une plage horaire de 3h consécutives sans rencontres par jour pour avancer les dossiers.
Il n’y a pas seulement des mesures autour de la déconnexion, précise Danny Déry.
«On offre aussi une formation sur la gestion des priorités parce qu’on considère que la priorisation est primordiale. Si tu tiens une bonne feuille de route pour gérer ta semaine, c’est très aidant pour être capable de déconnecter.»