L'Assemblée nationale est-elle trop blanche? Réflexions de cinq candidats | 24 heures
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L'Assemblée nationale est-elle trop blanche? Réflexions de cinq candidats

Image principale de l'article Trop blanche, l'Assemblée nationale?
PHOTOMONTAGE Julie Verville

L’Assemblée nationale est-elle trop blanche pour un Québec multiculturel? Une compilation (version émojis) des 125 élus qui formaient la 42e législature donne une idée générale de la représentation de la diversité dans la «maison du peuple».  

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On peut y constater que moins de 9% des élus sont issus des minorités visibles, et qu’aucun n’est Autochtone. Si on voulait y observer la même proportion que dans la population, on devrait plutôt être à 15%.  

Illustration en émojis des 125 élus de la 42e législature de l'Assemblée nationale du Québec au moment de la dissolution du Parlement, le 28 août dernier.

PHOTO Jean-Michel Clermont-Goulet | 24 heures

Illustration en émojis des 125 élus de la 42e législature de l'Assemblée nationale du Québec au moment de la dissolution du Parlement, le 28 août dernier.

À l’aide de cette image, on a donc demandé à cinq candidats et candidates issus de la diversité (une personne pour chaque grand parti) ce qu’ils pensaient de la composition du Salon bleu, où ils espèrent siéger sous peu. Voici leurs réponses, dans l'ordre alphabétique.

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Sabrina Ait Akil 

Candidate du Parti conservateur du Québec (PCQ) dans Mont-Royal–Outremont
Québécoise d’origine algérienne 

Sabrina Ait Akil, candidate du Parti conservateur du Québec (PCQ) dans Mont-Royal–Outremont

PHOTO Courtoisie

Sabrina Ait Akil, candidate du Parti conservateur du Québec (PCQ) dans Mont-Royal–Outremont

Votre réaction à l’AssNat en émojis. 

«Moi, ça ne me choque pas. Nous sommes au Québec et il y a plus de Blancs que de minorités visibles. Pour moi, le mot "diversité" est un mot très galvaudé utilisé à gauche et à droite.»

Donc l’AssNat n’est pas trop blanche, selon vous? 

«Absolument pas. Vous savez, je ne pense pas en termes de couleur de peau, d’origine ethnique ou de religion. Tout part de l’action volontaire. La question qu’il faudrait se poser, c’est pourquoi une certaine frange de la population s’implique plus que d’autres.»

Pourquoi n’y a-t-il pas davantage de personnes issues de la diversité qui se présentent en politique? 

«C’est d’abord une question de génération. Moi, je suis Algérienne d’une première génération d’immigrants. Est-ce que la priorité d’une première génération est nécessairement de s’impliquer en politique?»

«Il faut arrêter de donner trop d’importance à la couleur de peau ou au sexe. Je crois au talent, à l’intérêt, à la valeur ajoutée d’un individu, qu’il soit homme, femme, blanc, noir, etc.»

«Je suis "aveugle face à la couleur" [colorblind en anglais, NDLR]. Je regarde plutôt les qualités intrinsèques de l’individu. C’est une profonde insulte de réduire quelqu’un à sa couleur de peau, à son sexe ou à une particularité physique, simplement pour passer pour quelqu’un qui inclut tout le monde.»

Est-ce que de voir plus de députés d’origine maghrébine au Salon bleu par le passé vous aurait poussée à vous lancer plus tôt en politique? 

«Non. Il y a déjà quelques représentants de la communauté, comme Marwah Rizqy et Monsef Derraji, et ça ne m’a pas plus motivée.» 

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Omar Cissé 

Candidat du Parti libéral du Québec (PLQ) dans Taillon
Québécois d’origine sénégalaise 

Omar Cissé, candidat du Parti libéral du Québec (PLQ) dans Taillon

PHOTO Courtoisie

Omar Cissé, candidat du Parti libéral du Québec (PLQ) dans Taillon

Votre réaction à l’AssNat en émojis. 

«Écoutez, il n’y a que 11 personnes issues de la diversité. Elles sont clairement très peu et très sous-représentées.»

Pourquoi, donc, y a-t-il une sous-représentation des diverses cultures à l’AssNat? 

«Parfois, pour les immigrants, être député est inaccessible, car c’est très demandant et ça prend beaucoup de disponibilités. Plusieurs peuvent aussi croire que la porte de la politique leur est fermée, mais ce sont des idées préconçues.»

Pourquoi croient-ils que c’est inaccessible? 

«Parce qu’il y a moins de représentativité, mais aussi parce qu’ils croient qu’on ne donne pas de chances à la diversité. L’image de l’AssNat l’illustre parfaitement.»

«Quand on voit nos élus aux postes de ministres, il n’y en a pas tant que ça non plus qui sont issus de diverses cultures. Il faudrait faire du travail en amont pour défaire ce mythe.»

Est-ce positif, être colorblind en politique? 

«Personnellement, je n’ai jamais senti une histoire de couleur, car je me suis toujours considéré comme Québécois.»

«Je pense que ce qui intéresse la population va au-delà de la couleur des candidats. Ce qui les intéresse, ce sont surtout leurs propositions et s’ils vont y trouver leur compte, tant sur le coût de la vie, les impôts... les vrais enjeux, finalement.»

«Il faut aller au-delà du "Je vote pour lui, parce que c’est un Sénégalais". On est tous Québécois, et c’est ça l’important.»

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Stephan Fogaing 

Candidat du Parti Québécois (PQ) dans Hochelaga-Maisonneuve
Québécois d’origine camerounaise 

Stephan Fogaing, candidat du Parti Québécois (PQ) dans Hochelaga-Maisonneuve

PHOTO Courtoise

Stephan Fogaing, candidat du Parti Québécois (PQ) dans Hochelaga-Maisonneuve

Votre réaction à l’AssNat en émojis. 

«Je trouve qu’il manque d’informations. On ne peut pas s’arrêter à une seule facette de leur personne.»

«L’image ne dit rien sur le point de vue des députés. La diversité passe surtout par la diversité des points de vue et, justement, les communautés ne sont pas des blocs monolithiques où, par exemple, tous les Noirs ou tous les musulmans pensent pareil.» 

Donc, pour vous, l’Assemblée nationale n’est pas nécessairement trop blanche pour un Québec qui se veut multiculturel? 

«Le critère racial ne devrait pas être l’élément premier d’analyse d’une société. En considérant la couleur de peau comme facteur premier d’interaction avec [la diversité], on revient à une manière de faire qui est dépassée. On doit considérer les gens par leur citoyenneté avant leur identité.»

Il y a généralement plus de diversité dans les parlements des autres provinces qu'au parlement québécois. Qu'est-ce qui explique ça, selon vous? 

«Tu mets le doigt sur le caractère distinct des sociétés québécoise et canadienne. Au Canada, on parlera de multiculturalisme, soit qu’il y a plusieurs cultures qui cohabitent dans un environnement, mais qui n’ont pas nécessairement de liens entre elles.»

«Au Québec, on parle plutôt de cosmopolitisme, soit qu’il y a une culture avec des références communes, mais avec des bonifications provenant d’autres cultures qui viennent ajouter un plus à la culture collective.»

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Céline Haytayan 

Candidate de la Coalition Avenir Québec (CAQ) dans Laval-des-Rapides
Québécoise d’origine arménienne 

Céline Haytayan, candidate de la Coalition Avenir Québec (CAQ) dans Laval-des-Rapides

PHOTO Courtoisie

Céline Haytayan, candidate de la Coalition Avenir Québec (CAQ) dans Laval-des-Rapides

Votre réaction à l’AssNat en émojis. 

«Il y a d’abord une belle parité hommes-femmes à l’Assemblée nationale.»

«Je pense aussi à un avenir prochain et imminent, aux candidats de tous les partis, où il y a de plus en plus de candidatures de personnes issues des communautés culturelles, avec une belle diversité et toujours beaucoup de femmes. Ça me réjouit et ça fait du bien.»

«Le but, c’est qu’on soit autant que possible le reflet de la société dans laquelle on vit.»

Cette image reflète-t-elle bien le Québec d’aujourd’hui? 

«Je dirais que oui, d’abord parce que ce sont des élus choisis par les électeurs et électrices, qui eux sont issus de diverses communautés culturelles. Ils sont les décideurs, donc représentatifs de la démocratie.»

«Tous nos élus représentent à leur tour les citoyens et citoyennes de leur comté, toutes origines confondues.»

Au Québec, la politique est-elle inaccessible pour les Québécois issus de la diversité? 

«En ce qui me concerne, je n’ai jamais eu de malaise, de complexe ou d’impression de barrière pour me présenter en politique.»

«J’ai toujours senti de l’ouverture et de l’harmonie. Après, c’est un choix à faire et c’est tout un plongeon, se lancer en politique.»

Pour refléter la diversité au parlement, les partis politiques devraient-ils encourager les candidatures de personnes issues de diverses communautés ethniques? 

«Je pense qu’il faut vraiment un libre choix à tout un chacun. Les formations politiques, étant accueillantes, ça laisse la chance à tout le monde, peu importe leur origine, le milieu d’où ils viennent, leur âge ou leur genre.»

«La "Diversité", avec un "D" majuscule, c’est ça qui compte.»  

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Maïtée Labrecque-Saganash 

Candidate de Québec solidaire (QS) dans Ungava
Québécoise et Crie 

Maïtée Labrecque-Saganash, candidate de Québec solidaire (QS) dans Ungava

PHOTO Courtoisie

Maïtée Labrecque-Saganash, candidate de Québec solidaire (QS) dans Ungava

Votre réaction à l'AssNat en émojis. 

«Ouin [rires jaunes], c’est assez frappant. J’ai connaissance qu’à l’Assemblée nationale, en termes de proportion, il y a vraiment un gros manque de diversité, mais de le voir de même en image, ça résume assez bien la situation.» 

Pourquoi, selon vous, n’y a-t-il pas d’élus membres des Premières Nations [dans le dernier gouvernement]? 

«Je pense qu’il y a une certaine méfiance. À la base, ce n’est pas notre espace décisionnel. Les membres des communautés autochtones ont une appréhension d’aller travailler dans ces espaces législatifs là et avec raison. Historiquement, ils ont toujours travaillé contre nous et non avec nous.»

«Il y a moyen de mener à terme des dossiers quand même importants. Au fédéral, on en a eu la preuve dans les dernières années avec différents élus autochtones, qui font vraiment un gros travail en termes de décisions politiques, mais aussi en termes d’éducation populaire.»

Est-ce aussi par manque de modèle?  

«Absolument. En voyant qu’il n’y a pas d’Autochtones au parlement, ceux-ci continueront de le considérer comme un espace où ils ne sont pas nécessairement bien accueillis. Notre expérience au Salon bleu sera plus dure que pour, par exemple, un Jean-Claude de Terrebonne.»

Quel message ça envoie aux Québécois, l’important nombre de candidats autochtones aux prochaines élections? 

«Je pense que cette attitude-là, de faire comme si on n’existait pas, est quand même révolue et je suis contente que ça se reflète dans le désir de plusieurs membres des communautés de se présenter aux prochaines élections.»

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La diversité des candidats aux élections 2022

Le Journal de Montréal a compilé des données sur l’ensemble des candidats et candidates aux élections 2022, en date du 27 août 2022. Voici ce que celles-ci révèlent sur la diversité.  

Au total, 14% des candidats sont des personnes autochtones ou faisant partie de minorités visibles. C’est plus qu’en 2018, où on parlait plutôt de 9%.  

Voici le pourcentage que cette catégorie de candidats et candidates représente dans les différents partis:  

  • Parti libéral du Québec: 27% 
  • Québec solidaire: 18%  
  • Coalition Avenir Québec: 11% 
  • Parti conservateur du Québec: 10% 
  • Parti Québécois: 6% 

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