«Écoblanchiment»: Greenpeace porte plainte contre un groupe de pétrolières

Greenpeace Canada va déposer jeudi une plainte auprès du Bureau de la concurrence contre l’Alliance nouvelles voies, un regroupement des six plus grandes entreprises de sables bitumineux canadiennes, pour leur campagne publicitaire jugée «trompeuse».
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L’alliance, formée des entreprises Canadian Natural Resources Limited, Cenovus Energy, ConocoPhillips Canada, Imperial, MEG Energy et Suncor Energy, représente 95% de l’exploitation des sables bitumineux au pays.
Dans sa campagne «Mettons ça au clair», l’Alliance nouvelles voies soutient que «les entreprises de sables bitumineux sont en route vers la carboneutralité». «Les sables bitumineux sont une source importante d’émissions de CO2 au Canada», reconnaît le regroupement dans sa publicité.
Ce dernier vante ensuite le captage de carbone comme solution «pour réduire les émissions de plusieurs millions de tonnes par an».
Or, cette méthode est décriée par des experts et des environnementalistes, qui qualifient la technologie d’«embryonnaire».
Greenpeace souligne d’ailleurs dans sa plainte que «de nombreuses questions se posent quant à cette technologie, notamment celle de savoir si elle pourra être prête à temps [pour atteindre l’objectif national de carboneutralité] et si elle répondra aux besoins d’efficacité».
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«Si l’Alliance nouvelles voies veut “mettre les choses au clair”, qu’elle commence par admettre ce qu'est réellement sa campagne publicitaire : une tactique d’écoblanchiment», indique Priyanka Vittal, conseillère juridique de Greenpeace Canada dans un communiqué.
Des calculs erronés
L’organisme dénonce également que les efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’Alliance nouvelles voies ne tiennent pas compte de la plus grande partie des émissions (plus de 80%) de leurs produits, qui surviennent lorsque le pétrole est brûlé, bien qu’elle prétend qu’elle atteindra la carboneutralité d’ici 2050.
«Les membres de l'Alliance continuent d'accroître leur production de combustibles fossiles et leur plan de carboneutralité ne tient même pas compte de toutes les émissions. Il convient également de noter que malgré cette omission, le total de leur plan n'est toujours pas égal à zéro», illustre Priyanka Vittal.
Greenpeace cite par ailleurs la représentation erronée des membres de l’Alliance comme étant des leaders climatiques comme motif pour qualifier la campagne publicitaire de trompeuse.
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«Si vous voulez lever la main et dites que vous êtes un leader climatique, il y a une condition essentielle à remplir: vous devez faire le travail», ajoute Catherine McKenna, présidente du Groupe d’experts de haut-niveau sur les engagements de zéro émission nette des entités non-étatiques de l’ONU, et directrice des solutions climat et basées sur la nature.
«L’Alliance nouvelles voies inonde les ondes avec ses aspirations vers la carboneutralité, mais en réalité, ses émissions augmentent, elle n'investit qu'une fraction de ses bénéfices dans des solutions propres et fait du lobbying contre l’action en faveur du climat. Il est temps de tracer une ligne rouge autour de l'écoblanchiment», poursuit l’ancienne ministre fédérale de l’Environnement et du Changement climatique.
Retrait de la mention «carboneutralité» souhaité
Si le Bureau de la concurrence arrive lui aussi à la conclusion que l’Alliance nouvelles voies a fait des déclarations trompeuses dans sa campagne publicitaire, Greenpeace suggère qu’il la force à retirer toute mention du mot «carboneutralité» et des déclarations connexes.
L’ONG souhaite également que le regroupement publie une rétractation publique sur ses affirmations et qu’il paie une amende de 10 millions $ ou 3% de ses recette brutes mondiales.