Meurtres, trahisons, représailles: on vous résume l’histoire de la mafia montréalaise | 24 heures
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Meurtres, trahisons, représailles: on vous résume l’histoire de la mafia montréalaise

De gauche à droite: Nicolo Rizzuto, Vito Rizzuto, Leonardo Rizzuto, Nicolo Jr. Rizzuto, Francesco Del Balso.
Photomontage Marilyne Houde

De gauche à droite: Nicolo Rizzuto, Vito Rizzuto, Leonardo Rizzuto, Nicolo Jr. Rizzuto, Francesco Del Balso.

Tentative de meurtre, représailles, trahison, tête mise à prix, fuite: les événements spectaculaires impliquant des membres influents de la mafia montréalaise se sont multipliés dans les derniers mois. Retour sur l’histoire mouvementée de la pègre italienne de Montréal.

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Francesco Del Balso, un ancien lieutenant du clan sicilien mené par les Rizzuto, a été assassiné par balle lundi en plein jour devant un gymnase de l’ouest de l’île de Montréal. 

C'est lui qui aurait commandé la spectaculaire tentative de meurtre de Leonardo Rizzuto, selon ce qu'avançait le Bureau d'enquête de Québecor. La voiture du co-chef de la mafia montréalaise avait été criblée de balles, le 15 mars dernier, alors qu'il se trouvait sur la voie de service de l’autoroute 440, à Laval. Atteint plusieurs fois, le fils de l’ancien parrain Vito Rizzuto a échappé de peu à la mort. 

Maxime Deland / Agence QMI 

Le clan Rizzuto avait répliqué, mettant la tête de Del Balso à prix pour 250 000$, toujours selon le Bureau d’enquête. Ce dernier avait été intercepté par la police en tentant de fuir vers l’Italie. Il se cache depuis. 

Ces récents évènements n’ont rien d’exceptionnel pour le clan Rizzuto, habitué aux guerres intestines, soutient l’historien Luca Sollaï. 

«Les conflits au sein d’une même famille ou entre familles, c’est quelque chose qui est récurrent dans la mafia à Montréal, mais aussi ailleurs. Quand une faction est plus faible, l’autre tente de prendre le pouvoir et souvent on arrive à des confrontations mortelles», explique-t-il. 

Les origines de la mafia montréalaise

La mafia commence à s’implanter à Montréal à la fin des années 1910, sous l’égide de la famille Bonnano de New York. La plus puissante organisation mafieuse en Amérique cherchait à profiter de la position stratégique de métropole, explique Luca Sollaï. 

«La famille Bonnano voulait étendre son pouvoir à Montréal pour exploiter ses installations portuaires, idéalement placées vers les ports d’Europe et de la côte est américaine. Ils ont donc donné le contrôle à une famille calabraise locale en qui ils avaient confiance, les Cotroni», raconte-t-il.

Pendant plusieurs années, les Cotroni contrôlent discrètement les opérations criminelles au centre-ville de Montréal. À l’époque, les Rizzuto et les Siciliens ne formaient qu’une petite faction au sein de l’organisation.  

Joseph Bonanno, ke parrain de la mafia de New York au début des années 1900

Toronto Sun Files 

Joseph Bonanno, ke parrain de la mafia de New York au début des années 1900

Mais voilà qu’en 1972, le gouvernement du Québec mène une attaque en règle contre la mafia en créant la Commission d’enquête sur le crime organisé (CECO). Affaibli, le meneur de la mafia montréalaise, Vic Cotroni, nomme Paolo Violi, un de ses puissants lieutenants, numéro deux de l’organisation. Sa nomination ne fait pas l’unanimité.  

«Violi ne s’entend pas bien avec les Rizzuto. Il y a une sorte de guerre intérieure qui éclate entre les familles. Elle va se solder, avec la permission de la famille Bonnano de New York, par le meurtre de Paolo Violi par les Rizzuto en 1978», relate Luca Sollaï.

Le meurtre sonne de début d’un changement de garde: ce sont désormais les Rizzuto qui mènent. 

La naissance d’un géant

Dans les années 1980 et 1990, le crime organisé montréalais s’impose de plus en plus sur la scène internationale. Différents groupes criminels, comme les motards, s’établissent dans la métropole. La mafia réussit cependant à tirer son épingle du jeu. 

Les talents de rassembleur du parrain Vito Rizzuto, considéré comme le plus grand mafioso de l’histoire du Canada, lui permettent d’orchestrer des opérations conjointes avec les autres organisations criminelles du Québec et de l’Est ontarien. La mafia prospère et diversifie alors ses activités. 

Vito Rizzuto

Photo d'archives 

Vito Rizzuto

«Des entreprises légales, notamment dans le domaine de la construction, ont été créées pour blanchir de l’argent», explique Luca Sinaï.  

La chute

Après des années fastes, la mafia montréalaise est fortement secouée en janvier 2004, quand Vito Rizzuto est arrêté pour une affaire d’homicide survenue aux États-Unis 20 ans plus tôt. Le parrain est extradé pour faire face à la justice. En son absence, l’unité entre les différentes factions s’effrite. 

Le 22 novembre 2006, les autorités portent le coup de grâce: 90 individus liés à la mafia montréalaise sont arrêtés lors de l’opération Colisée, la plus grande opération policière antimafia de l’histoire du Québec. 

Secoué, le clan sicilien devient une cible de choix pour les criminels les plus ambitieux. 

Leonardo Rizzuto photographié en 2007 derrière  son frère aîné, Nick Jr, qui a été assassiné en décembre 2009.

Photo d'archives 

Leonardo Rizzuto photographié en 2007 derrière son frère aîné, Nick Jr, qui a été assassiné en décembre 2009.

Des attentats contre les proches du parrain se multiplient: 

  • Le fils aîné de Vito Rizzuto, Nicolo Jr., est assassiné en 2009. 
  • La même année, son beau-frère, Paolo Renda, disparaît après avoir été enlevé en pleine rue. 
  • En novembre 2010, le père de Vito est assassiné chez lui par tireur caché dans les bois entourant son domicile.

La mafia en crise

À son retour au Canada en 2012, Vito Rizzuto orchestre sa vengeance. Le parrain meurt toutefois subitement d’un cancer en 2013. 

Sans véritable meneur, la mafia vit depuis des moments difficiles. Les incendies criminels et les tentatives de meurtre – dont celle envers Leonardo Rizzuto – qui se sont multipliées lors des dernières années en sont la preuve. 

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