On a jasé avec des personnes qui ont été ghostées par un ami (ou qui ont ghosté)

Il n’y a pas qu’en amour qu’on peut se faire ghoster, en amitié aussi. Du jour au lendemain, quelqu’un que vous pensiez être votre ami peut disparaître de votre vie sans explication. On a jasé avec des personnes qui ont ghosté et qui ont été ghostées.
Il arrive qu’à travers une vie, nos relations changent et qu’on perde de vue certains proches et amis. Mais ce qui blesse particulièrement dans le ghosting, c’est l’ambiguïté. On se demande ce qu’on a fait de mal, souvent sans savoir.
Pourquoi faire ça à des amis, alors? Souvent, parce que la personne qui ghoste ne se sent pas prête à avoir une discussion avec l’autre pour couper les ponts, pour plein de raisons.
Il est rare qu’un évènement isolé soit la seule cause de ce genre d’abandon. C’est souvent le résultat d’une accumulation de frustrations qui finissent par déborder.
Même si l’ami ghosté est celui qui généralement souffre le plus, chaque situation est unique. Des personnes nous racontent leur expérience en lien au ghosting amical.
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Julia, qui a été ghostée par une amie d’enfance
«Ma meilleure amie d’enfance, que je connaissais depuis que j’avais 6 ou 7 ans, m’a ghosté du jour au lendemain, à mes 19 ans. Je n’ai jamais su pourquoi.
On faisait de la danse ensemble, nos parents s’entendaient bien, elle venait souvent chez moi et moi chez elle pour faire des sleepover et on étudiait ensemble. Quand on a eu 15 ans, on a rencontré une autre amie et c’est devenu un trio. La dynamique a changé et c’est devenu souvent deux contre une.
Ma meilleure amie a soudainement coupé tout contact, mais je voyais que les deux continuaient de se voir. Je suis déménagée et je me suis fait d’autres amis, mais c’était dur.
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Quelques années plus tard, j’ai appris qu’elle venait de perdre sa mère d’un cancer. Elle avait été très présente pour moi quand mon père est décédé quand j’étais ado. Je lui ai écrit pour lui transmettre mes sympathies et elle m’a laissée en vue. Ça m’a rendu très triste.
Encore aujourd’hui, j’avoue que je la stalke sur les réseaux sociaux de temps en temps.»
Olivier, qui a repris contact avec un ami qui l’avait ghosté
«Je me suis fait ghoster par mon meilleur ami il y a 6 ans. On s’était rencontrés au cégep et on passait beaucoup de temps ensemble. Il a déménagé après qu’il y ait eu de la mortalité dans sa famille.
Je le contactais régulièrement pour qu’on se voie et il avait de plus en plus d’excuses pour annuler. Je faisais des compromis et je me déplaçais pour aller le voir en banlieue, mais après un moment, c’était toujours non. Il a arrêté de répondre à mes messages.
Le fait que je ne comprenais pas ce qui s’était passé m’empêchait de passer à autre chose. Ça s’appelle ghoster, parce que la personne disparait progressivement sans donner de nouvelles. Mais, en réalité, c’était moi le fantôme qui regardait sa page Facebook tous les mois pendant 6 ans pour voir ce qu’il faisait, s’il avait de nouveaux amis ou de nouvelles valeurs qui pourraient expliquer que, du jour au lendemain, je ne sois plus dans ses plans.
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Depuis, j’ai fait du travail sur moi-même et j’ai décidé que je voulais comprendre, peu importe comment ça se passait. Donc, je l’ai recontacté après tout ce temps. Il m’a répondu et on s’est vus en personne pour en parler.
C’était merveilleux, on pouvait parler pendant des heures comme si on s’était vu la veille. Il s’est excusé, il a pris la responsabilité. Il a même avoué que si les rôles avaient été inversés, il ne sait pas s’il aurait pu me relancer comme je l’ai fait.
On a parlé de santé mentale et du contexte dans lequel il était. J’ai admis que comme je ne pouvais pas comprendre la perte d’un parent, j’avais mal réalisé son expérience. Je n’avais pas su à l’époque comprendre les signes de sa dépression.
Mais, j’ai encore des enjeux non résolus là-dessus et il va falloir lui faire confiance au compte-goutte pour la suite des choses, pour éviter d’être blessé à nouveau.»
Marie-Lee, qui a ghosté plusieurs amis
«J’ai ghosté tellement d’amis dans ma vie. Je n’étais vraiment pas fine et dès qu’il y avait un inconfort, je les flushais, comme des fréquentations. J’ai des troubles de l’abandon qui découlent de mon adoption et du fait que j’ai été souvent exclue dans mon enfance, mais ça ne change pas que j’ai fait de la peine à beaucoup de bonnes personnes!
Je me rappelle d’une amie que je trouvais trop intense. Elle m’écrivait message par-dessus message. Je ne trouvais pas ça évident et je ne savais pas poser mes limites.
Après que je l’aie ghostée, elle m’a écrit pour me donner un char de marde. C’était une réaction exagérée, mais c’était un peu mérité. J’aurais dû dire la vérité, je n’en suis pas fière.
Aujourd’hui, je fais plus attention et je m’embarque moins rapidement dans des relations aussi intenses.»
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Ophélie, qui a ghosté un ami qui avait d’autres intentions
«J’avais un ami avec qui j’étais allée au secondaire et avec qui je faisais du Donjon & Dragon au cégep.
Après un moment, j’ai remarqué qu’il recommençait à m’écrire pour qu’on se voie ou pour prendre des nouvelles systématiquement à chaque fois qu’il cassait avec une blonde et qu’il était tout à coup célibataire.
Je me suis rendu compte qu’il entretenait ce genre d’amitiés avec des filles un peu comme une réserve de futures blondes potentielles. Ça m’a tellement dégoûté que je l’ai ghosté. Je ne voulais plus mettre d’énergie dans cette amitié s’il me voyait comme ça.
Je l’ai recroisé quelques fois dans la rue après et je faisais comme si je ne l’avais pas vu.»
Charlie, qui a ghosté un ami qui a drastiquement changé
«Ça fait plus d’un an que je ghoste un ancien ami. Quand je l’ai connu, c’était un gars ouvert avec plein de passe-temps. On partageait les mêmes opinions côté politique et justice sociale. Pendant le confinement, sa santé mentale s’est dégradée et il a changé du tout au tout.
Il a commencé à avoir un discours vraiment limite et parfois haineux à propos de groupes marginalisés, il faisait souvent l’avocat du diable. Plus le temps passait, plus je commençais à prendre mes distances, parce que je ne voulais pas être en contact avec ce genre de négativité. Quand j’ai appris qu’il avait été violent avec sa copine, ç’a été trop.
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Ce n’était plus le même gars que j’avais connu il y a des années. Avec le recul, je pense à des interactions qu’on a eues et il y a des red flags que je n’avais pas remarqués.
Je l’ai supprimé de tous les réseaux sociaux, mais il continue d’essayer de me rejoindre par téléphone ou en passant par d’autres amis. Il m’a demandé plein de fois ce qu’il avait fait pour mériter ça, mais je ne pense pas que je lui dois une réponse.»