Il a créé à Drummondville une usine qui produira 400 millions de mouches chaque jour | 24 heures
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Il a créé à Drummondville une usine qui produira 400 millions de mouches chaque jour

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D’ici quelques semaines, une usine flambant neuve de Drummondville produira chaque jour quelque 400 millions de mouches soldat noires. Et même si elles ne finiront pas directement dans votre assiette, les larves de Cédric Provost pourraient bien s'inviter chez vous, dans la gamelle de votre animal de compagnie. 

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C'est au bout d’un long chemin rocailleux, dans le parc industriel de Drummondville, que se dresse l’usine d’Entosystème et ses 100 000 pieds carrés. Vu de l’extérieur, difficile de deviner que c'est ici que sera bientôt produit près d’un demi-milliard de larves chaque jour.

Pourtant, on est bien dans la plus grande fabrique d’insectes d’Amérique du Nord. 

L'usine d'Entosystem à Drummondville

Photo Entosystem 

L'usine d'Entosystem à Drummondville

Rassurez-vous (ou pas), les bestioles produites – des mouches soldat noires, totalement inoffensives pour l’homme – n'ont aucune chance de se retrouver dans votre assiette.  

En revanche, elles travailleront pour l’environnement en réduisant le gaspillage alimentaire... et en fournissant de la protéine pour les croquettes de votre chien ou la nourriture de votre chat. 

Procédé zéro déchet 

Comment? Grâce à un procédé industriel de transformation des déchets.  

En gros, Entosystem récupère de la matière première auprès de ses fournisseurs (résidus de boulangerie, fruits et légumes avariés, résidus de l’industrie agroalimentaire, etc.).  

L’entreprise trie ensuite les emballages de plastique avant de récupérer la matière organique qui servira à nourrir des larves qui naissent dans ses installations. 

Une fois rassasiées et arrivées à maturité, ces larves seront séchées puis transformées en une farine et une huile protéinée destinées à l’alimentation des animaux domestiques et d’élevage.  

Le reste des déchets et des déjections de larves sera vendu sous la forme de frass, du fumier de larves d’insectes utilisé comme fertilisant dans l’agriculture biologique. 

Photo Mathieu Carbasse 

5000 tonnes de larves  

«Nous ne possédons pas de site d’enfouissement, 100% de la matière que nous recevons est valorisée», s'enorgueillit Cédric Provost, cofondateur et président d’Entosystem, une entreprise qui fait du zéro déchet la base de son modèle d’affaires. 

«Nos client achètent soit la larve (la protéine) soit le résidu (fumier). En dedans de 6 jours, on transforme des déchets en deux produits à valeur ajoutée.» 

Cédric Provost, président et cofondateur d'Entosystem

Photo Mathieu Carbasse 

Cédric Provost, président et cofondateur d'Entosystem

Quand elle tournera à plein régime, l’usine d’Entosystem traitera ainsi quotidiennement 250 tonnes de déchets, soit 90 000 tonnes de détritus par an. En retour, elle produira chaque année 5000 tonnes de larves protéinées et 15 000 tonnes d’engrais bio (quatre gros camions par jour).

Une usine carbonégative 

«D'un côté, 40% des aliments produits au Canada sont gaspillés ou perdus et sont normalement destinés à l’enfouissement, ce qui est nocif en termes d’émission de gaz à effet de serre et de méthane», explique M. Provost, 34 ans, qui a étudié en administration à l’UQAM avant de lancer son entreprise et de se mettre à élever des larves dans son sous-sol, il y a 6 ans de ça. 

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«D’un autre côté, on a beaucoup trop d’animaux domestiques qui consomment de la viande. Et puis, troisième point, une grande partie des fertilisants à base d’azote [utilisés en agriculture] viennent de Russie... Bien sûr, on ne peut pas tout remplacer, mais on fait un pas dans la bonne direction.» 

Photo Mathieu Carbasse 

Si l’usine d’Entosystem valorise les déchets organiques, elle réussit aussi la prouesse d’être carbo-négative, c’est-à-dire qu’elle produit plus d’énergie qu’elle en consomme.  

«On évite l’émission de 40 000 tonnes de CO2 dans l’atmosphère», affirme Cédric Provost. 

Dans l’immense pouponnière qui héberge les larves pendant leur développement et qui ressemble plus à un entrepôt d’Amazon qu’à une ferme d’insectes, la chaleur est tropicale. Dans les bacs où sont entreposées les larves en croissance, la température peut atteindre 50 degrés.

Les 400 millions d’insectes qui s’y trouvent dégagent une chaleur telle qu’Entosystem s’en sert pour chauffer l’usine.  

Zéro difficulté à embaucher 

En pleine pénurie de main-d’œuvre, Entosystem n’a eu aucune difficulté à recruter ses quelque 90 employés, confie Cédric Provost, dont l’entreprise a bénéficié de 60 millions$ d’investissements publics et privés pour construire son usine.  

«Je crois que notre mission environnementale plaît au monde. On offre de bonnes conditions aussi mais ça ne fait pas tout. On est tous environnementalistes, on a aussi une bonne proportion de végans et de végétariens dans l’équipe», dit-il. 

«On veut des gens qui croient qu’ils peuvent changer le monde», de conclure celui qui regarde désormais vers l’Ontario et les États-Unis pour développer son entreprise.  

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