2 nouveaux papas nous expliquent pourquoi ils ont pris un long congé de paternité

Jamais les pères n’ont pris d’aussi longs congés parentaux au Québec que maintenant, selon les chiffres du Régime québécois d'assurance parentale (RQAP). Deux papas partagent leur expérience.
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Olivier Bujold, 38 ans, a pris deux mois de congé parental en même temps que sa partenaire lorsque leur petit Théodore est né. Depuis que sa conjointe est retournée au travail, en avril dernier, et jusqu’en septembre, c’est lui qui est à la maison avec leur enfant.
Pour lui, c’était important de pouvoir passer du temps de qualité seul avec son bébé.
«Dès le départ, c’était important pour nous autres: une question d’équité et d’égalité, indique le père de famille. On trouvait aussi que c’était super important qu’il y ait une présence paternelle, et pas seulement une présence maternelle.»
Olivier Bujold profite au maximum de son congé. Lui et Théodore visitent les cafés de Québec, passent du temps à la joujouthèque de la Basse-Ville et reçoivent souvent de la visite de grand-maman.
Un changement dans la loi
Olivier Bujold est loin d’être le seul nouveau papa à prendre un tel congé parental.
Dans la première moitié de 2021, 20% des parents qui ont eu un enfant ont partagé le congé pour que chaque membre du couple ait au moins six semaines à la maison, toujours selon les chiffres du RQAP. Lors de la même période en 2020, ils n’étaient que 8% à l’avoir fait.
Il faut savoir que depuis le 1er janvier 2021, les nouveaux parents qui souhaitent partager plus équitablement le congé parental peuvent gagner quatre semaines de congé supplémentaires, s’ils ont opté pour le régime de base du RQAP. Pour y avoir droit, chaque parent doit prendre huit semaines de congé.
«Cette nouvelle mesure est là pour favoriser le partage des congés, l’engagement des papas, mais, aussi, pour amener une meilleure compréhension de l’expérience de la parentalité qui est absolument transformatrice», soutient Charles Beaudoin-Jobin, un papa de 36 ans.
«Je l’ai vécu [le congé parental] comme une expérience où on [les papas] comprend dans toute sa complexité, dans toute son intensité, ce que veut dire être là dans les premiers moments d’un nouveau-né», poursuit le professeur de sociologie au cégep.
«Du moment où on comprend toutes ces petites tâches au quotidien, tous ces recommencements, parce que c’est toute une autre routine à créer, on voit à quel point c’est une charge [mentale d’être parent]. Je pense que ça permet de renégocier pour des relations qui sont plus équitables.»
Charles Beaudoin-Jobin, qui a pris 13 semaines pour s’occuper de sa fille à la maison, n’aime d’ailleurs pas du tout l’expression «congé parental». S’occuper d’un bébé, c’est tout sauf être en congé, insiste-t-il.
Ce qui agace le plus Olivier Bujold, c'est quand on lui demande si c’est lui qui garde son enfant. «Des fois quelqu’un qui va dire "c’est toi qui gardes l’enfant aujourd’hui". Il n’y a pas de gardiennage, c’est mon enfant que j’élève», lance-t-il.
Une décision généralement bien reçue
S’il affirme avoir reçu de nombreux commentaires positifs et admiratifs de gens croisés avec sa fille pendant son congé, Charles Beaudoin-Jobin a également ressenti certaines insatisfactions.
Selon lui, même si on souhaite, comme société, que les papas soient plus impliqués à la maison pour s’éloigner du «fameux modèle de ménagère et pourvoyeur», la décision de prendre une pause dans sa carrière pour être avec son enfant et s'occuper de sa famille n’est pas toujours bien reçue dans le monde professionnel.
«C’est du non-dit, mais on sent cette pression [de devoir continuer à s’impliquer au travail ou dans d’autres engagements]», soutient-il, tout en ajoutant que les femmes subissent une telle pression depuis bien longtemps.
En moyenne, au Québec, les pères ont pris un congé parental de 10 semaines en 2021. On est bien loin de l’époque du père de Charles Beaudoin-Jobin qui n’avait eu droit qu’à cinq jours de congé.